Immobilier : A Piriac-Sur-Mer des prix comme à la Baule
Aujourd'hui, on est sur les prix de la Baule
Sur la devanture de cette agence immobilière de Piriac-sur-Mer (Loire-Atlantique), la photo d'une belle maison en pierre est barrée du bandeau « vendue immédiatement ».
Traduction de Yannick Fleury ?
« Cela signifie qu'elle est partie en une journée », explique la vendeuse de biens. Et c'est comme ça presque à chaque fois. « Je dois refaire ma vitrine tous les quinze jours », continue-t-elle, face à la trentaine de panneaux « à vendre » suspendus face à la rue.
C'est un fait, les annonces pour un pied-à-terre dans cette commune de la presqu'île guérandaise ont une durée de vie très limitée. Mieux vaut donc être réactif et, surtout, disposer d'un portefeuille bien garni. Car ici, le mètre carré ne se négocie pas en dessous de 4 000 euros, minimum. « Aujourd'hui, on est sur les prix de la Baule », constate Yannick Fleury, qui a déjà mené des transactions dans la très chic station balnéaire, à une vingtaine de kilomètres de là. Qui, du coup, peut bien se permettre un tel investissement sans un apport considérable et, surtout, face à des acheteurs qui, le plus souvent, « paient cash » ? Pas les jeunes du coin manifestement. La fameuse « maison de caractère » en pierre ? « J'ai eu cinq visites, aucun local », assure ainsi Mme Fleury.
On voudrait bien avoir des jeunes qui s'installent sur notre territoire pour vivre et travailler, ce serait bien pour nos écoles et nos commerces.
Mais le foncier est tellement cher qu'ils ne peuvent pas acheter un morceau de terrain, qui se fait de plus en plus rare. C'est un grand souci, notamment pour le premier adjoint en charge des écoles.
Le désarroi du maire
Et voilà comment Piriac compte désormais 69 % de résidences secondaires.
Quant à ceux qui ont les moyens d'établir ici leur adresse principale après avoir (bien) vendu leur précédente habitation, ce sont le plus souvent des retraités. Une double conséquence qui plonge le maire dans un grand désarroi. « On voudrait bien avoir des jeunes qui s'installent sur notre territoire pour vivre et travailler, ce serait bien pour nos écoles et nos commerces, souligne Jean-Claude Ribault. Mais le foncier est tellement cher qu'ils ne peuvent pas acheter un morceau de terrain, qui se fait de plus en plus rare. C'est un grand souci, notamment pour le premier adjoint en charge des écoles. »
L'adjoint en question, c'est Loïc Chesnel, et tous les ans, il scrute avec attention la démographie locale comme on surveille les vagues qui rongent le littoral. « Avant chaque rentrée, je me demande si on va réussir à maintenir les effectifs en place. On a six classes de primaire, dont quatre en public. On n'est pas encore à l'élève près, mais en cas de mutation professionnelle de plusieurs parents, cela peut faire des enfants en moins, car ce ne sont pas toujours des familles qui arrivent ensuite à la place. »
Cette situation n'est pas réservée à Piriac, loin de là.
De l'estuaire de la Loire au Finistère en passant par le golfe du Morbihan, c'est toute la façade maritime de la Loire-Atlantique et de la Bretagne qui est concernée par cette réalité : plus on approche de la mer, moins les prix sont abordables pour les locaux. Ces derniers se retrouvent contraints de reculer à l'intérieur des terres, s'éloignant ainsi de leur lieu de travail ou de leur territoire d'origine. Résultat, « les villes sont complètement mortes, s'emporte Ewan Thébaud, porte-parole du collectif Dispac'h (révolte en Breton). Quand on a des communes qui ont entre 50 et 70 % de résidences secondaires occupées principalement l'été, c'est plus de la moitié des maisons qui sont fermées l'hiver ! On a un tissu social qui se délite, des services publics qui ferment, et tout cela a des conséquences sur le développement durable des territoires. »
Pour le groupe militant, qui appelle d'ailleurs à manifester ce samedi à Quiberon, des solutions existent pour contrer cet accaparement des mètres carrés. Le classement de la Bretagne en zone tendue pour taxer davantage les résidences secondaires, ou la création d'un statut de résident breton qui donnerait une priorité d'accès des logements aux locaux. De quoi crever d'un coup la bulle immobilière, selon Ewan Thébaud : « cela ferait mécaniquement baisser les prix puisque les gens extérieurs ne pourront plus acheter ».
Un vœu récurrent, exprimé de longue date par plusieurs partis indépendantistes, mais que le président de la Bretagne, Loïg Chesnais-Girard, avait retoqué lors de la dernière campagne des régionales, en juin 2021, le qualifiant d'« inefficace et dangereux ». « Ce n'est pas à une administration de décider qui est breton ou non », avait ajouté l'élu.